(édito)

Hasard du calendrier ou pas, deux élections présidentielles auront lieu en Afrique
subsahélienne au cours de cette année 2025. La première se déroulera en Côte d’Ivoire le
26 octobre et la deuxième au Cameroun au cours du même mois. Dans les deux cas, les

présidents à vie et en poste se représenteront malgré l’âge, le cumul des mandats et le non-
respect des constitutions.

Le ciel s’assombrit en Afrique subsahélienne où des foyers de guerre font des ravages dans
les populations sacrifiées. A ces maux viennent s’ajouter le terrorisme islamique bien
implanté dans les pays du Maghreb avec la bénédiction des grandes puissances. Cette
menace est brandie chaque fois que l’Afrique noire remet en cause les accords coloniaux
pour s’émanciper. La Côte d’Ivoire et le Cameroun vont-ils s’ajouter à ces foyers de
tension à l’approche des nouvelles échéances présidentielles ?
En Côte d’Ivoire, Alassane Ouattara, chantre de la « démocratie » a délibérément choisi
d’éliminer tous ses opposants potentiels. Plus rusé, Paul Biya organise des « élections
libres » où tous les candidats sont autorisés à concourir.
Dans les deux cas, la victoire des « élus de Dieu » est assurée. Il ne saurait en être
autrement car ces « vizirs illuminés » sont indétrônables en autocratie. Ils règnent dans un
contexte politique où toutes les contestations sont étouffées, brimées et écrasées. Les
opposants politiques ou ce qu’il en reste n’ont aucune chance de briller. Ces élections
masquent, aux yeux de l’opinion internationale, une mascarade que nul ne saurait
cautionner.
A vrai dire, les dés sont jetés. Paul Biya et Alassane Ouattara représentent bien cette
Afrique conditionnée par les années d’esclavage qui se prolongent à travers des pouvoirs
politiques de despotes à la solde des puissances scélérates.
Les deux candidats ont des alliés de poids : le conseil constitutionnel est soumis quel que
soient les résultats des urnes avec la complicité évidente des commissions électorales où
les listes des citoyens sont bourrées de faux électeurs quand ce ne sont pas les urnes.
L’Afrique souffre-t-elle toujours du syndrome de Stockholm ? Sans aucun doute. Ces
dirigeants caressent dans le sens du poil les anciens maitres devenus des « partenaires ».
Les deux figures en liste illustrent parfaitement ces cas d’école où la soumission reste la
seule issue pour un règne à vie.
La recette est immuable. Ces régimes politiques gouvernent par la peur, la terreur,
l’appauvrissement volontaire de la population, la précarité mentale et physique, la maladie,
le désespoir, etc. Rien n’explique le silence et la complicité des nations dites libres et qui
nous gavent de leçons de résilience, de liberté, de fraternité et surtout d’égalité.

Face au cocktail explosif en préparation, les dictateurs séniles ont-ils conscience des
aspirations de leur jeunesse qui n’en peut plus de galérer face aux défis qui se profilent ?
La soif du pouvoir peut-elle expliquer les égoïsmes de la cour, les injustices, la pauvreté
galopante, le tribalisme, les inégalités cumulatives, la corruption systémique ?
Le déni est devenu le fer de lance des deux gouvernants dont les prisons regorgent
d’opposants politiques. Pour ces dirigeants sénilles, cyniques et frappés de cécité, tout va
bien dans le meilleur des mondes. Loin de s’attaquer aux vrais problèmes de leurs échecs
successifs de développement et à leur récurrence, ces pouvoirs despotiques sont incapables
de s’interroger, d’offrir des perspectives à leur jeunesse condamnée à émigrer pour fuir la
pauvreté. Non, Alassane Ouattara et Paul Biya n’ont jamais incarné un espoir et une vision
moderne de leurs pays. Ils ont choisi de régner jusqu’à la mort pour ne pas être jugés. Ils
vivent dans la peur et cette dernière les transforment en bête blessée. Ils sont déshumanisés
et prêts à tout pour survivre. Sont-ils conscients de leur faiblesse ? Nous en doutons.
Ces dirigeants s’emmurent dans leur forteresse, inconscients du changement inéluctable
qui se profile car toute l’Afrique a besoin d’une nouvelle ère de gouvernance pacifiée, non
servile et au service du peuple. Ces deux lascars sont incapables de prendre la pleine
mesure des enjeux sécuritaires liés au péril et à la dégradation économique qui menacent
leur pouvoir.
Ce constat dégage deux hypothèses : l’aveuglement des pouvoirs politiques qui ne veulent
ni rien voir, ni rien entendre et la banalisation de la violence policière et militaire pour se
maintenir au pouvoir. Ces violences ont une limite. Nos chefs d’état doivent en tenir
compte pour éviter l’exil sans espoir après le pouvoir.

Par Michel Lobè Etamè
Journaliste Indépendant, essayiste et romancier

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