Adieu le bon vieux langage feutré de la diplomatie. Emmanuel Macron s’est lâché devant les journalistes dans l’avion qui le ramenait d’Israël vers la France. Il s’est ainsi librement exprimé sur trois sujets brûlants de l’actualité :

  • L’islam radical ;
  • Les tensions identitaires qui traversent la société française ;
  • Les discours politiques extraordinairement coupables.

Beaucoup retiendront que la crise sociale en France agace le pouvoir et donne une image d’un pays hyper stratifié. Certes, nous ne pouvons complètement donner tort à Emmanuel Macron. Mais il porte aussi une grande responsabilité du climat politique anxiogène et délétère qui commence à pousser le citoyen à douter de la solidité des institutions.

Il faut reconnaitre que la France traverse une crise identitaire qui remonte à François Mitterrand qui a fait des promesses qu’il n’a jamais tenues. L’arrivée de Jacques Chirac, de Nicolas Sarkozy, de François Hollande puis d’Emmanuel Macron n’a fait que renforcer un sentiment d’abandon de l’État. 

Mais ce qui retient mon attention sur le discours improvisé et sarcastique d’Emmanuel Macron est la colère qu’il exprime face au « discours politique extrêmement coupable ». Car, à écouter le jeune et frêle président, ses détracteurs font preuve d’une extrême imprudence et d’une profonde naïveté en qualifiant la France de dictature.

Emmanuel Macron n’a pas tort. La France n’est pas une dictature. Car, selon lui, une dictature est un pouvoir politique qui ne change jamais ses dirigeants. J’insisterais sur ce point de vue qui résume assez bien les pouvoirs politiques en Afrique Subsahélienne d’expression française que le pouvoir français bichonne.  

Peut-on décrier un système inique chez soi et le consolider ailleurs ? Cette question mérite d’être débattue car elle est l’expression narrative de la relation ambivalente entre la France et ses ex-colonies. Le discours d’Emmanuel Macron est clair et limpide comme l’eau de roche. Nous ne pouvons y déceler le moindre doute, surtout quand il poursuit en ces termes : « Une démocratie, explique-t-il, c’est un système politique où l’on choisit nos dirigeants. C’est un système politique où l’on choisit des représentants qui auront à voter librement les lois qui régissent la société. Cela a beaucoup d’exigence, cela veut dire que la liberté du peuple et sa souveraineté sont reconnues. Mais cela a une contrepartie, c’est que dans une démocratie, on a un devoir de respect à l’égard de ceux qui représentent et votent cette loi, parce que précisément, on a le pouvoir de les révoquer. On a l’interdiction de la haine, parce qu’on a le pouvoir de les changer »!

Et il poursuit dans des termes peu amènes : La dictature, elle justifie la haine. La dictature, elle justifie la violence pour en sortir. Mais il y a en démocratie un principe fondamental : le respect de l’autre, l’interdiction de la violence, la haine à combattre ».

Que nous soyons dupes ou pas, nous ne pouvons retirer à Emmanuel Macron sa vision du monde qui est l’expression de tous les peuples épris de liberté.
Si Emmanuel Macron prenait pour illustration les républiques francophones subsahéliennes, son discours n’aurait pas un sens encyclopédique. Mais, ce n’est pas le cas. Car il le dit lui-même : La dictature c’est un régime où une personne ou un clan décide des lois. Une dictature c’est un régime où l’on ne change pas les dirigeants, jamais.

Comme ses prédécesseurs, Emmanuel Macron nous livre une diatribe sur la dictature. Mais il oublie de déplacer son curseur vers l’Afrique francophone où les dictatures perdurent avec la bénédiction implicite de la France.

Nous pouvons reconnaitre en Emmanuel Macron un grand homme qui a une profonde vision sociale et sociétale pour la France. Mais le tableau serait plus éloquent si les mêmes règles s’appliquaient dans les anciennes colonies françaises d’Afrique où les dictatures en place brisent les rêves d’une jeunesse qui aspire à la liberté.

N’est-il donc pas temps de mettre fin à la réalité évidente de la relation incestueuse entre la France et ses « colonies africaines » pour une démocratie universelle ?
 
 
Par Michel Lobé Etamé
Journaliste

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