La rhétorique de reconquête économique anime les débats en Afrique francophone. Elle est largement relayée dans les débats télévisuels, les journaux et les réseaux sociaux. Mais la réalité est tout autre. L’Afrique francophone, loin des idéaux de liberté de ses pères fondateurs morts en martyrs, a fait le choix de la soumission imposée par les anciens esclavagistes et colonisateurs. Ses dirigeants actuels n’ont aucune vision du monde qui évolue à leurs yeux. Ils sont heureux de s’abriter, tels des poussins, sous les ailes de leurs bourreaux.
Les échecs économiques qui trahissent les incompétences des dirigeants africains font les choux gras des médias occidentaux. Ils génèrent la pauvreté. Ces femmes et ces hommes ont-ils conscience de leurs faiblesses ? Sont-ils à la hauteur de leur tâche ? Assurément, non ! Le pouvoir illusoire qu’ils exercent avec férocité sur les peuples leur garantit un long règne. Aucune révolte n’est tolérée et le peuple est mis au pas par la brutalité policière et des élections truquées qui les « légitimisent ».
Ces dirigeants jouissent de la bénédiction du pouvoir néocolonialiste. Mais un autre acteur vient s’ajouter à la puissance politique coloniale. C’est la multinationale sans nationalité. Elle est puissante et redoutée. En plus de son pouvoir économique et financier, elle interfère à volonté sur le champ politique.
L’Afrique est alors livrée à deux maîtres dont les intérêts sont complémentaires. Dans ces conditions, ses dirigeants serviles sont soumis à un dictât qui les infantilise. Ils intègrent les loges ésotériques occidentales et se livrent volontairement à la soumission du « Grand Maître ». Ils deviennent des jouets lors des discutions dans les salons de thé en Occident.
Le drame de l’économie coloniale en Afrique
Pour l’Occident, l’Afrique doit vendre à vil prix ses matières premières minières et agricoles. Elle ne doit point les transformer et intégrer le cercle des pays industriels. Les prix de ces matières premières sont sous contrôle. Ils sont immuables. Les crédits « octroyés » par la Banque Mondiale favorisent les cultures d’exportation tels que le cacao, le café, la banane, l’hévéa ou le thé qui alimentent les grandes surfaces en Occident.
C’est dans ce contexte que le Ghana, pays anglophone, a pris la courageuse décision de suspendre ses exportations de cacao vers la Suisse. Rappelons que le Ghana et la Côte d’Ivoire produisent plus de la moitié du cacao dans le monde. Si la Côte d’Ivoire s’associait à l’initiative du Ghana, les prix pratiqués bougeraient. Mais, Alassane Ouattara prendrait-il le risque de froisser ses protecteurs ?
Notons aussi que les superficies dédiées aux cultures d’exportations explosent et pénalisent les productions des cultures vivrières dont les superficies se rétrécissent. Le manioc, l’igname, le riz, le mil ou la patate douce se raréfient sur les marchés. Leurs prix les rendent inaccessibles et provoquent par réaction une flambée des prix. La faim pousse les pauvres dans la rue. Ces émeutes de la faim sont brutalement et sauvagement réprimandées par les autorités respectives.
Dans ces conditions, l’Afrique francophone ne peut se développer. Si elle développe une industrie locale, elle freinerait les exportations « sauvages » des multinationales. Pour les anciens colonialistes, cette solution n’est pas envisageable car le marché occidental est saturé. L’Afrique reste par définition une propriété de l’Occident avec un milliard de consommateurs.
Une autre menace vient s’ajouter à la pauvreté des pays francophones : le djihadisme. L’Occident implante un peu partout des bases militaires pour exploiter les peurs au nom de la lutte contre le terrorisme. Ces présences militaires étouffent nos souverainetés. Elles contribuent à nous endetter pour les équipements de nos armées fantoches.
Malgré ce chaos, l’Afrique offre des garanties à l’Occident. Elle est riche en matières premières agricoles et minières. Elle peut emprunter à vie pour consommer, mais pas pour produire. Elle est donc condamnée à la dépendance et au bon vouloir de l’Occident. Mais, pour combien de temps ?
Cette question est de plus en plus évoquée par la nouvelle jeunesse résiliente africaine qui a choisi de relever les défis et de faire sauter les pièges placés par l’Occident. Elle remet en cause une monnaie coloniale servile et dégradante.
Mais les pays occidentaux ne manquent pas de subterfuges. Ils ne s’affichent que sur le terrain militaire. Ils laissent la sale besogne aux institutions financières qui distribuent des crédits à tous les états surendettés et insolvables. L’Afrique doit consommer. Mais elle doit consommer les produits occidentaux. Elle emprunte et elle est incapable de rembourser. Elle ne peut échapper au nœud qui l’étrangle. Elle choisit l’assistanat qui conduit vers un sous-développement archaïque.
L’Afrique est alors soumise à des contraintes insurmontables auprès des organismes financiers. Ces derniers leur imposent des conditions draconiennes. Comme elle ne peut payer, elle troque ses richesses minières et perd sa souveraineté Ce dictât prévisible en fait une prisonnière obligée qui engraisse les entreprises coloniales implantées.
Les économies d’Afrique francophone ne peuvent décoller dans ces conditions. Voilà les vraies raisons de la perpétuation de l’économie coloniale en Afrique francophone. Ce piège est la conséquence des incompétences des dirigeants en poste. L’Afrique est livrée à trois catégories de pourfendeurs : les colons d’hier, les multinationales et les dirigeants africains en poste. La corruption trouve ici toute sa plénitude et piétine le développement en fabricant des fonctionnaires milliardaires. Voilà pourquoi l’économie coloniale survit en Afrique. Elle écrase la production locale au détriment des importations qui tuent toutes les velléités des entrepreneurs locaux.
Par Michel Lobé Étamé
Journaliste Indépendant