A Versailles, l’ancien président a dénoncé vendredi tous les blocages qui menacent les projets de développement dans des pays comme la France.
Ce devait être un discours sur l’architecture et le Grand Paris, à l’occasion de l’inauguration à Versailles de la première biennale d’architecture et de paysage organisée par la région Ile-de-France. Mais Nicolas Sarkozy, appelé vendredi 3 mai à donner son point de vue de « grand témoin » sur le sujet, ne s’est pas contenté d’évoquer le patrimoine, l’urbanisme ou l’aménagement du territoire. Parlant sans notes durant une demi-heure, l’ancien président de la République s’est surtout alarmé de ce qu’il nomme « la disparition de l’Occident », et de tous les blocages qui menacent les projets de développement dans des pays comme la France.
« Ne faisant plus de politique, je peux m’affranchir de certaines prudences » et « dire ce que je pense », a annoncé en préambule Nicolas Sarkozy. Puis il a livré le fond de sa réflexion : « Je ne veux pas cacher mon inquiétude sur une forme de disparition de l’Occident. » Pendant des siècles « l’axe du monde était occidental »,a-t-il expliqué. Aujourd’hui, « ce n’est pas être un décliniste que de dire que l’axe du monde est oriental ».
L’architecture « baromètre » du déclin
En évoquant cette crainte d’une chute de l’Occident, l’ancien président de l’UMP, devenu depuis Les Républicains (LR), reprend à son compte un questionnement très présent à droite depuis plusieurs années, mais qui est aussi un des grands thèmes de la culture occidentale de longue date : l’ouvrage fameux et très controversé d’Oswald Spengler intitulé Le Déclin de l’Occident (1918-1922 ; Gallimard, 1931) a été écrit juste avant la première guerre mondiale, il y a plus d’un siècle.
Aux yeux de Nicolas Sarkozy, l’architecture fournit un « baromètre exact » de ce déclin. « Une société vivante construit, bâtit, affirme-t-il. Une société qui s’apprête à mourir n’a plus de projets. » Or telle est bien selon lui la situation qui prévaut en Europe, et singulièrement en France. « La moitié de mon temps, je suis à l’étranger, a-t-il poursuivi. Je ne peux me résoudre à y voir partout des grues, des chantiers, des métros fantastiques, des musées, et puis revenir ici, où on me dit : “On a renoncé à ça parce qu’il y avait le crapaud doré”… »
Une référence à tous les recours intentés par des associations de riverains ou d’écologistes qui entravent les grands chantiers d’infrastructure tels que l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, abandonné par Emmanuel Macron au début de son quinquennat.
« Aujourd’hui, si quelqu’un avait l’idée de faire la tour Eiffel, vous verriez les associations, ce qu’elles viendraient dire… »
Or « si la dernière association a le pouvoir d’empêcher de faire et si toute l’énergie d’un pays est mise à bloquer ce pays, l’architecture mourra » – et donc le pays avec lui, selon la théorie du baromètre –, a martelé Nicolas Sarkozy.
« Il faut que le président casse les résistances »
De même, il s’en est pris à toutes les contraintes réglementaires qui freinent les grands projets. Le château de Versailles, dans l’enceinte duquel se tenait la manifestation, « est-il conforme au PLU [plan local d’urbanisme] ? », a demandé en souriant l’ancien président.
Le cas du Grand Paris a fourni un autre exemple de ces difficultés. Quelques minutes plus tôt, Valérie Pécresse, la présidente (LR) de la région, avait dit sa déception quant à ce vaste projet lancé justement par Nicolas Sarkozy en 2009 : « Vos successeurs n’ont pas été au rendez-vous ! Ils ont réduit le Grand Paris à une strate administrative supplémentaire et à un grand métro certes indispensable mais qui accumule les surcoûts et les retards. »
Refusant pareil échec, l’ancien hôte de l’Elysée a incité les élus présents en nombre à ne pas lâcher prise, et appelé Emmanuel Macron à se mobiliser : « Il faut y aller, y aller vite, et que le président de la République booste, casse les résistances, entraîne. » Pas question selon lui de prétexter des problèmes financiers. « L’immobilier va exploser autour des nouvelles gares, a-t-il assuré. Le Grand Paris, je l’affirme, va rapporter de l’argent, parce qu’il sera le témoignage de l’ambition et de la croissance françaises. »