(édito)

Les élections présidentielles de 2025 approchent au pas de course au Cameroun. Les débats télévisés
s’enchainent autour du bilan du président Paul Biya qui règne sans partage depuis quarante-deux ans.
Un record pour une autocratie dans le monde. A quatre-vingt-onze ans, Paul Biya est plus que jamais
maitre du jeu et censeur devant l’éternel.
Ce règne long et sans éclat questionne les politologues et les politiciens. Tous se découvrent des
ambitions. Qui pour succéder à Paul Biya ? Et si ce dernier, malgré l’âge et la raison se représentait à
nouveau ? Ces interrogations tournent en boucle et écument les débats sur les plateaux de télévision.
Deux camps aux discours antinomiques s’affrontent. Pour les membres du RDPC, parti au pouvoir et
chargé d’appliquer les politiques sans queue ni tête du président, les quarante-deux ans de règne de
Paul Biya ont hissé le Cameroun sur l’arène africaine et mondiale. Pour le deuxième camp, celui des
opposants tolérés du régime, le pays n’arrête pas de sombrer. Il est dans un piteux état.
Une autre voix, plus distincte, circule dans une arène où les vérités et les réalités quotidiennes affichent
le doute permanent, la lassitude et une émotion personnelle. C’est celle de l’homme de la rue confronté
quotidiennement à la faim, à la maladie, au chômage, à l’insécurité et au désespoir du lendemain.
Une pauvreté intérieure
Le bilan discutable du long règne de Paul Biya est marqué par la vacuité intellectuelle des acteurs de la
vie politique bridée au Cameroun où chaque prétendant joue les coudes pour participer au repas insipide
que lui offre le pouvoir. Les plus ambitieux, ceux qui osent afficher leur différence sont marginalisés,
embastillés ou prisonniers.
Mais ce n’est pas une excuse pour se dérober de son devoir de citoyen. La vie politique est faite de haut
et de bas. Elle est caractérisée par des combats où les acteurs affrontent des scénarios imprévisibles car
le camp des plus forts ne fait jamais de cadeau. Il broie, écrase et piétine tous ceux qui remettent en
cause leurs sales besognes.
Ces récalcitrants qui survivent au milieu des putatifs ne sont pas légion. Mais ils existent. Le moment est
bien venu pour qu’ils sortent de l’ombre. Les prochaines échéances présidentielles sont ouvertes car le
règne du RDPC est à bout de souffle. Ce parti, usé naturellement par le temps est à l’image de son
président. Il n’a plus rien à proposer.
Face au chao ambiant de fin de règne, l’opposition doit plus que jamais afficher ses prétentions, sa
cohérence et son unité. Ces conditions sont à respecter pour donner une image différente d’un nouveau
cycle qui se veut ambitieux, souverain et prétentieux.
L’atmosphère de fin de règne qui prévaut actuellement au Cameroun est un signe de rupture d’un
clanisme désavoué, d’un tribalisme piteux, d’une corruption généralisée et d’une violence non contenue.
C’est du pain béni pour cette opposition qui souffre aussi de tribalisme, ce mal édifié par le pouvoir actuel
où la méritocratie n’a jamais eu sa place.
Pour cette opposition, il ne suffit pas de s’inviter sur tous les plateaux de télévision pour dénoncer les
échecs successifs de Paul Biya dont le bilan est on ne peut plus décrié. Il suffit juste de proposer un
programme responsable et afficher une unité, même de façade car le peuple attend autre chose que des
promesses irréalisables.
Mais qui pour conduire cette opposition ?
Les prétendants ne manquent pas. Mais deux se distinguent de plus en plus. Si rien ne les oppose, ils
peuvent se distinguer par leur charisme. Cabral Libii et Maurice Kamto font un ticket gagnant. Cette
union n’est pas de façade. Elle associe un jeune ambitieux et téméraire à un homme que les épreuves
ont façonné. Ils jouissent tous les deux d’une grande expertise.
Tous les deux ont conscience de cette proximité et de l’enjeu électoral. Qu’attendent-ils pour consolider
leur union face à la machine de guerre RDPC usée par les scandales à répétition qui marquent un
mélodrame flamboyant d’une fin de règne et sans éclat ?

Michel Lobé Etamé

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