On aurait pu croire que l’opposition camerounaise est damnée. Que non ! Elle a choisi de s’auto-flageller. C’est un statut qui lui sied bien car elle est estampillée comme telle. Elle a choisi d’être enchainée et embastillée.
Nous aspirons à vivre en harmonie autour des règles communes définies par des institutions solides. Certes, elles sont confrontées à des intérêts divergents. La gestion de ces intérêts peut être une source de conflits ou d’antagonismes permanents. Il convient donc, pour l’intérêt supérieur de la nation, d’instaurer une démocratie qui permettra aux idées triomphantes de s’imposer par la voie des urnes.
Le jeu démocratique tire sa légitimité des élections qui réservent toujours des surprises. Les campagnes électorales libres permettent à chaque camp de s’exprimer, de présenter un programme de gouvernement et de faire adhérer librement le citoyen vers des hommes et femmes représentatifs.
Le pouvoir en exercice, qui est le résultat des urnes, doit être respecté et reconnu. Il est légitime et conduit une politique qui est majoritaire. Dans les démocraties, le suffrage universel permet des alternances. Le peuple juge, sanctionne et peut donner sa chance à une nouvelle équipe. C’est le jeu démocratique.
En Afrique subsahélienne, les pays d’expression française ont choisi une autre voie : celle des présidences à vie. Les raisons sont simples : s’éterniser au pouvoir par des élections truquées et dictées par l’ancienne puissance coloniale qui est la France. Le rôle de l’opposition devient quasi nul. Les hommes en exercice ont la caution de leur maître et écrasent sans état d’âme les oppositions « légitimes et majoritaires ».
Le cas du Cameroun.
La guerre d’indépendance a causé de nombreux dégâts matériels, humains et psychologiques au Cameroun. Le premier parti d’opposition, l’UPC (Union des Populations du Cameroun) présidé par le héros national, Ruben Um Nyobé, a été décimé. Les cadres qui ont échappé aux assassinats programmés par les colons se sont ralliés au pouvoir en place.
Le combat n’a pas pour autant disparu. L’UPC a vu certains de ses cadres courageux battre campagne pour relever le défi et poursuivre la lutte pour la liberté et l’indépendance totale.
L’UPC est aujourd’hui un parti démembré. Ses cadres reconnus ont rejoint le RDPC (Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais) au pouvoir. D’autres continuent le combat à l’instar du Manidem et de ses affidés. Mais les trahisons ont toujours raison de leur unité.
Cette opposition, mal organisée, parfois honnie, affamée et à cours d’idées, ne supporte pas l’arrivée sur la scène politique de nouveaux partis plus dynamiques, mieux structurés, insoumis et jaloux de leur liberté. Elle scrute le moindre geste de la nouvelle vague « insolente et irrespectueuse » à l’instar du MRC (Mouvement Pour La Renaissance du Cameroun) présidé par Maurice Kamto.
À cours d’idée, la prétendue opposition est ringarde et incapable de se réinventer depuis des décennies. Elle pratique la politique de la terre brûlée. C’est elle ou rien. Tout nouvel opposant est mal venu. Elle veut que Maurice Kamto fasse acte d’allégeance à leurs partis moribonds. Elle en a besoin pour rebondir et devenir incontournable. Mais elle n’a pas de charisme.
Incapable de renouveler ses cadres, cette opposition s’est accommodée à la chienlit et combat par tous les moyens les nouveaux partis d’opposition. C’est une aubaine pour le pouvoir RDPC qui voit en elle un allié contre-nature pour vicier la nouvelle vague.
Tous ces pseudos opposants sont des pique-assiettes sans vergogne à la merci du pouvoir. Ils parcourent les plateaux de télévision et les radios très disponibles pour ostraciser la vraie opposition qui donne des sueurs froides au pouvoir en place.
Il ne faut point s’étonner que les adversaires de la vraie opposition, celle représentée par Maurice Kamto, ne sont autres que les réfractaires à l’alternance politique et en mal de reconnaissance. Le régime leur sous-traite alors le « sale boulot » de démolition de l’opposition avec l’appui et la bénédiction du parti-État RDPC.
Ce jeu de dupe n’échappe à personne. Il est la conséquence d’une pauvreté galopante qui a ruiné les esprits de ceux qui étaient censés représenter les dignes enfants de l’UPC. À la pauvreté matérielle s’est ajoutée la pauvreté d’esprit structurelle qui nous ramène à la métaphore de la grenouille cuite.
Oui, il faut l’admettre, le peuple a été conditionné pour supporter sans broncher la pauvreté et les inégalités criardes.
Maurice Kamto en a conscience. Sa résilience en fait une cible désignée du pouvoir.
Par Michel Lobé Étamé
Journaliste Indépendant