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L’INDISPENSABLE OPÉRATION – CLARIFICATION DANS LA POLITIQUE CAMEROUNAISE : QU’EST CE QUE L’OPPOSITION AU CAMEROUN AUJOURD’HUI ?

La lutte pour le changement au Cameroun, se trouve à une période charnière de son histoire. Ce pays, hanté par les affres de la colonisation, cancérisé par une dictature néo-coloniale, cleptocratique, n’a jamais connu d’alternance au sommet de l’État, depuis son accession à l’indépendance en 1960.

Pourtant, ce n’est pas faute d’avoir une opposition ambitieuse, qui ne s’est pas privée pendant les années d’indépendance, à recourir à la force armée, pour tenter de s’emparer de son destin et obtenir la libération du Cameroun.

Dans cette quête, l’élection présidentielle de 1992 et celle de 2018 ont été remportées dans les urnes, respectivement par Ni John FRU NDI, le leader du SDF et Maurice KAMTO, le leader du MRC. Mais la dictature néo-coloniale incarnée depuis 38 années par Paul BIYA, a par le contrôle qu’elle a des institutions, refusé toute l’alternance en réprimant dans le sang, les tentatives de protestation.

L’OPPOSITION IMPUISSANTE RÉVISE SES AMBITIONS ET CÈDE À LA TENTATION DES DÉLICES DU POUVOIR

Par la violence, le régime de BIYA a insidieusement inoculé, dans l’opposition et dans le subconscient du peuple camerounais, l’idée d’une impossible alternance au Cameroun. Ceci a eu comme conséquences pour le peuple, un désintéressement, un éloignement, une désaffection de la chose politique et donc des urnes, et pour l’opposition, une profonde révision de ses prétentions politiques, à défaut de pouvoir envisager vigoureusement, la démarche insurrectionnelle qui semblait de facto être la seule réponse à la violence politique qui s’abattait sur elle.

Par des renoncements successifs donc, l’opposition s’est donnée une nouvelle ambition, exister, se planquer, obtenir les strapontins politiques que le pouvoir de Yaoundé veut bien lui concéder. Finalement céder à la tentation des ors du pouvoir.

A l’épreuve du jeu institutionnel, des partis politiques tels le MDR, l’UNDP, l’UPC, le SDF… se sont atrophiés, ont perdu du terrain et sont finalement devenus des gadgets institutionnels entre les mains du régime dictatorial de Yaoundé , sans aucune aptitude à influer sur le jeu politique.

En effet,

– En 1992, “l’opposition” représentait 92 Députés 

– En 1997, “l’opposition” représentait 71 Députés 

– En 2002, “l’opposition” représentait 31 Députés 

– En 2007, “l’opposition” représentait 27 Députés 

– En 2013, “l’opposition” représentait 32 Députés 

– En 2020, “l’opposition   représente  27 Députés 

Les élus de l’opposition, désormais constitués en une aristocratie politique, se sont embourgeoisés, ont établi avec le pouvoir, de véritables corridors de la corruption, sont entrés en intelligence avec l’oppresseur, entraînant dans cette démarche les partis politiques dont ils sont issus, lesquelles sont devenus des cautions politiques et démocratiques, d’une des plus vieilles dictatures au monde.

L’OPPOSITION DITE DE LA LÉGALITE RÉPUBLICAINE CONTRE L’OPPOSITION DE LA RUPTURE

Ce positionnement politique et institutionnel fait que ces partis apparaissent comme génétiquement hostiles à tout autre parti nouveau ou émergeant, qui se réclame de l’opposition et surtout qui ambitionne non pas simplement d’entrer dans le jeu institutionnel, mais de prendre le pouvoir. Dans cet ordre d’idées, Le MRC dont le leader, Maurice KAMTO, a revendiqué la victoire à la dernière élection présidentielle, n’a à aucun moment, reçu le soutien de ses pairs de l’opposition, notamment de Josua OSIH, Cabral LIBII, Espoir MATOMBA… Plus grave encore, quand Maurice KAMTO, ses partisans et ses alliés sont, à la suite de manifestations pacifiques, arrêtés et jetés en prison, le silence complice, voire l’approbation, face à une des plus scandaleuses violations des droits humains, de ces opposants institutionnels furent retentissants.

On a ainsi vu émerger une nouvelle forme de positionnement politique que j’ai qualifié, sous les critiques d’observateurs complaisants, d’opposition de l’opposition. En réalité, beaucoup d’acteurs politiques ne trouvent leurs intérêts que lorsque règne le cafouillage et la confusion qui induisent une absence de clarification dans l’opposition, plombe, stérilise l’action politique des forces de l’alternance et fait le lit de la dictature.

LA POLITIQUE N’A DE SENS QUE SI ELLE PUISE SON ESSENCE DANS LA VIE DES GENS

L’opposition doit pouvoir se définir au regard des enjeux qui sont ceux d’un Cameroun écrasé par une dictature sauvage, endeuillé par le génocide le plus stupide de l’ère moderne. Ces enjeux ne peuvent se réduire à ceux de partis de positionnement, qui contestent leur place dans le système et non le système. Ces enjeux ne peuvent se réduire, à avoir un ou plusieurs élus et ainsi donner une caution démocratique à un régime dictatorial .

De manière plus décomplexée, des partis politiques et personnalités se réclamant d’une prétendue opposition, qui n’existent désormais que par les égards et les regards du pouvoir de Yaoundé, sont promus, encadrés, protégés, sponsorisés par ce pouvoir. Ce positionnement opportuniste de leaders politiques usés, manquant d’agilité et d’ambition leur permettant de se réinventer ou de partis politiques d’implantation et de rayonnement insuffisants, se contentent d’exister par tous les moyens, y compris en s’opposant aux forces qui dans l’opposition incarnent de manière plus pertinente cette opposition, dont le rayonnement et les ambitions sont en adéquation avec les enjeux du changement au Cameroun.

La politique n’a de sens que si elle puise son essence dans la vie des peuples. Elle doit cesser au Cameroun d’être le champ d’expression de roublards et d’escrocs internationaux qui comme des charognards, vivent de la misère et du sang des opprimés. Ce propos peut paraître excessif si on ne le met en rapport avec la renonciation aux voies et moyens, dont disposaient l’ensemble des partis politiques se réclamant de l’opposition, pour faire plier le pouvoir dans ses dérives dictatoriales et notamment, dans la boucherie humaine en cours au NOSO.

DILUER LES RESPONSABILITES DES CRIMES DE GUERRE DANS LE NOSO

Le bilan humain de la guerre civile au NOSO devient de plus en plus lourd et donc difficile à assumer en tant que choix politique par le régime RDPC. Les officiels camerounais, qui refusent toute visite d’observateurs dans la partie Anglophone du pays, redoutent particulièrement les accusations de génocide qui se font de plus en plus véhémentes. C’est alors, qu’ils se souviennent des appels au dialogue qu’ils ont ignoré depuis deux ans. L’objectif de ce « dialogue » dont sont exclus les principaux protagonistes de la crise politique au Cameroun est triple: à l’international, donner de l’oxygène à ce régime en fin de vie, à l’intérieur, isoler politiquement les anglophones ambazoniens, le MRC de Maurice KAMTO et ses alliés et surtout, bâtir une alliance politique autour de la gestion criminelle de cette crise, laquelle suscite écœurement et révulsion. Le but étant d’en sortir avec la mise à l’index des anglophones radicalisés et ainsi diluer la responsabilité personnelle du régime, dans cette guerre, en donnant à posteriori, à option militaire (génocidaire), une onction nationale voire internationale.

Comment comprendre, que des personnalités, des partis politiques se réclamant de l’opposition aient pu donner leur caution à une entourloupe biaisée dès sa conception, excluant les principaux acteurs de la crise politique au Cameroun, notamment les séparatistes et le MRC ? Cette démarche a installé résolument un vrai clivage dans la politique camerounaise : le camp de ceux disposés à accompagner le régime dictatorial de Yaoundé dans sa quête d’oxygène pour sa survie et le camp de ceux revendiquant un ordre politique et social nouveau, plus juste. Le boycott des dernières élections par le MRC et ses alliés; élections auxquelles ont participé les formations politiques cautions du « grand dialogue », constitue le point culminant de cette fracture.

On a donc une opposition dite de la légalité républicaine qui revendique 27 députés à l’Assemblée Nationale, constituée de l’Union nationale pour la démocratie et le Progrès(UNDP) de Bello Bouba Maigari qui comptabilise 6 sièges, le Social Démocatic Front(SDF)t de Ni John Fru Ndi avec 5 députés, l’Union pour la démocratie du Cameroun(UDC) du Dr Adamou Ndam Njoya de regrettée mémoire avec 4 sièges , le Mouvement démocratique pour la Défense du Cameroun(MDDC) avec 2 sièges.LeParti camerounais pour la Réconciliation national(PCRN) de Cabral Libii avec 5 députés , le Front pour le Salut national du Cameroun(FCNC) du ministre Issa Tchiroma Bakari ayant à son compteur 3 sièges et enfin l’Union pour un mouvement social(UMS) de Pierre Kouemo avec 2 députés, et une opposition dite de la rupture qui tous les jours fait la démonstration de son incroyable force sur le terrain au Cameroun et à l’étranger, le MRC de Maurice KAMTO et ses alliés.

L’OPPOSITION N’EST PAS CETTE MIXTURE INSTABLE DE TOUT CE QUI N’EST PAS OUVERTEMENT RDPC

La question qui importe hic et nunc d’être posée est celle de savoir comment cette opposition dite de la légalité républicaine, qui jusqu’ici n’a pas eu l’honnêteté de dénoncer la supercherie honteusement baptisée de « grand dialogue» au regard des résultats chaotiques obtenus sur le terrain, peut avec 27 députés sur 180, influer significativement sur les crises multiples au Cameroun. La réponse à cette question est des plus simples. Cette « opposition du décret de Paul BIYA », n’a aucun moyen légal d’impulser dans un sens ou dans un autre la marche des affaires du Cameroun. C’est simplement une opposition d’accompagnement démocratique mieux une opposition de collaboration.

On est presque obligé d’accompagner le qualificatif « opposition » d’un épithète quand on parle de cette opposition qui en réalité ne s’oppose plus à rien du tout. Ces partis qui, sous le prétexte de divergences stratégiques avec leurs pairs de l’opposition, affichent des orientations plus proches du pouvoir RDPC que de l’opposition la plus représentative, tout en se réclamant quand même de l’opposition, sont simplement dans l’imposture politique, dans la tricherie intellectuelle et morale.

Non ! L’opposition n’est pas cette mixture instable de tout ce qui n’est pas ouvertement RDPC. En réalité, s’observe ce qui s’est passé avec l’UNDP, l’UPC, le MDR, le FCNC… une phase transitoire de la migration vers le pouvoir… Reproduire cette démarche qui a échoué au nom de l’opposition est un crime contre la démocratie, un crime contre le peuple camerounais. L’idéal de liberté , de démocratie, de paix et de prospérité ne passera pas par le RDPC. Faut-il encore le prouver ? Les intérêts de ces « institutionnels » sont désormais aux antipodes de ceux du Peuple camerounais.

L’IMPOSSIBLE CONCILIATION DES INSTITUTIONNELS ET DES PARTISANS DE LA RUPTURE

Il ressort de ce qui précède que l’entité qui doit être considérée comme l’opposition au Cameroun, c’est le MRC et ses alliés et elle n’est pas représentée dans les institutions. Ses choix politiques s’opposent désormais à ceux des « institutionnels de l’opposition », sans aucune possibilité en l’état, de les concilier. Pourquoi veut-on que Joshua OSHI, Cabral LIBII, NDAM NJOYA, BELLO BOUBA et d’autres, élus députés, exigent franchement une réforme du système électoral et une reprise des élections à la faveur d’un Vrai Grand Débat National qui inaugurerait le printemps politique d’un Cameroun nouveau, sachant que s’invitera dans ces circonstances, l’ogre MRC à cette élection, ce qui anéantirait toute chance pour la plupart d’entre eux de se faire élire ?

Le pouvoir politique de BIYA a son « opposition » qu’il bichonne et espère bien pouvoir l’utiliser dans sa stratégie rodée, d’isolement de la vraie opposition. En chœur, ils annoncent la mort politique de Maurice KAMTO et du MRC, absents de l’ordre politique et institutionnel de Paul BIYA. Tel est le nouveau chantier politique de ces alliés illégitimes, qui tiennent leur changement personnel et font désormais tout pour que rien ne change.

Me Amédée TOUKO TOM

Ancien Conseiller Juridique du SDF

Ancien Secrétaire Provincial SDF- Ouest

Militant – Analyste Politique

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