Les régimes politiques en Afrique noire traversent une zone de turbulence dont les issues sont incertaines car le poids de la néo colonisation est de plus en plus mal perçu par une jeunesse qui ronge ses freins. La question de la légitimité de ces régimes se pose. Est-ce le choix du peuple ou celui des forces exogènes ?
Depuis les indépendances, tous les pouvoirs politiques en Afrique subsahélienne ne doivent leur survie qu’au poids des anciens colonisateurs qui continuent à imposer des femmes et des hommes mal élus. Ces pratiques dénoncées avec véhémence par des oppositions affaiblies, sans envergure, constamment brutalisées et broyées conduisent à des modes de gouvernance qui pillent les « jeunes états ». Les chefs d’états deviennent des marionnettes au service des multinationales et des néo-colonialistes qui ont tout à gagner à imposer une injustice de plus en plus insupportable.
Pour se doter de crédibilité et avec l’appui de leurs mentors, l’Afrique a mis en place des organisations calquées sur le modèle occidental. Elle a créé l’Union Africaine, la CEDEAO, la CEMAC et autres organisations qui ne sont rien d’autre que des pantomimes.
Ces organisations se révèlent être de véritables syndicats au service des chefs d’états corrompus et discrédités. Elles cautionnent les élections truquées, les successions dynastiques ou les prolongations des mandats présidentiels. Le rôle de ces organisations devrait interroger le monde dit civilisé qui dénonce, à travers les médias bien ciblés, les dictatures de l’Europe de l’Est. Il n’en est rien.
L’Afrique peut-elle continuer à se soumettre à une gouvernance sans aucune légitimité ? La question de la démocratie n’est pas évoquée. Elle va s’imposer avec le temps. Mais aujourd’hui, l’Afrique veut des chefs d’états charismatiques capables de défendre ses intérêts. Or, nul ne l’ignore, la plèbe actuelle rend des comptes aux forces exogènes. Elle ne décide ni n’initie des projets favorables à la sortie du sous-développement matériel et mental. Pire encore, elle n’ose dénoncer les accords coloniaux qui étouffent nos libertés d’actions.
Les organisations africaines se discréditent chaque fois qu’elles sont amenées à trancher dans les conflits des états. L’Union Africaine est restée muette lors de la transition monarchique au Tchad où Emmanuel Macron a intronisé le fils d’Idriss Déby. Elle n’a pas levé le petit doigt quand Alassane Ouattara et Alpha condé ont délibérément violé leurs propres constitutions pour un nouveau mandat.
Que dire des organisations régionales ? Elles sont à l’image de leurs dirigeants. Ces comportements deviennent insupportables et donnent de l’Afrique l’image d’un continent volontairement corrompu, servile et infantilisé. D’où la question récurrente : l’Afrique est-elle un continent avec des états indépendants ? Les chefs d’états africains sont-ils légitimement élus et par qui ?
Encore un plouf !
La CEDEAO a encore perdu l’occasion de s’affirmer comme une organisation régionale ambitieuse et impartiale. Elle vient de prendre des décisions qui l’éloignent de ses objectifs d’arbitrage. En décidant de condamner les dirigeants actuels du Mali, elle s’est lourdement trompée. Elle n’est plus dans son rôle. Au lieu de choisir le dialogue pour une issue consensuelle, les dirigeants de la CEDEAO ont eu la main lourde. Ces sanctions ne risquent-elles pas de pousser le Mali vers d’autres partenaires ?
Les sanctions sont à l’image des dirigeants. Elles portent la couleur des forces exogènes qui ne supportent pas de voir un pays africain décider librement de sa politique intérieure et extérieure. Mais pire encore, le Mali veut sous-traiter sa sécurité par le Groupe russe Wagner.
Ce choix est insupportable pour la France et l’Union Européenne, malgré les charges contre la politique africaine de la France et la complicité de nos dirigeants. L’insécurité, la pauvreté et la corruption continuent à anéantir tous les efforts de la société civile dans le continent.
La sécurité ne viendra pas des efforts des organisations régionales ou de l’Union Africaine. Le véritable problème est celui de la mauvaise gouvernance et de la pauvreté. Pour cela, nous avons des institutions. Il suffit tout simplement de les respecter. La souveraineté, la démocratie et autres modes de gouvernance ne viendront que confirmer les aspirations d’un peuple qui ne supporte plus ses dirigeants enchaînés et soumis.
Voilà des questions qui vont encore soulever des débats. Le vrai problème aujourd’hui n’est plus celui de la légitimité de nos chefs d’états. Ce que la jeunesse attend de ses dirigeants est autre : des chefs charismatiques avec des projets ambitieux pour sortir de la nuit profonde qui marque le règne de nos dirigeants. Seules ces conditions doivent être remplies.
Par Michel Lobé Étamé
Journaliste Indépendant