La relation entre la France et ses anciennes colonies n’a pas eu de place au cours du duel télévisé qui a opposé Emmanuel Macron à Marine Le Pen. Et pour cause ? C’est un non sujet qui n’intéresse pas les français. Ce consensus est largement partagé par toute la classe politique en France.
L’extrême droite a l’honnêteté d’affirmer haut et fort son discours décomplexé et exclusif à l’égard des étrangers qui sont responsables des actes d’incivisme et de l’insécurité subie par le paisible citoyen français.
Cette posture est revendiquée. Elle porte la marque d’une idéologie qui stigmatise principalement les anciennes colonies soumises, depuis les indépendances, à un rôle subalterne, infantilisant et méprisant.
Mais que dire de la droite et de la prétendue gauche française ? N’est-ce pas une main de fer dans un gant de velours ? Dans les deux cas, l’Afrique est bien seule à porter son fardeau qui pèse sur ses épaules.
Un silence qui trahit une cause
Les chefs d’Etats de l’Afrique francophone jouent, depuis les indépendances, un rôle trouble aux cours des élections présidentielles en France. Ils financent les campagnes électorales de leurs bourreaux sans distinction. Quel que soit l’élu, ils pérennisent leurs fauteuils. Ils ne se prononcent jamais pour un camp. Cette neutralité a l’avantage de perpétuer des comportements sans foi ni loi qui consistent à maintenir dans les anciennes colonies des femmes et des hommes mal élus et qui, malgré eux, deviennent des dictateurs accrochés à vie dans leurs sièges.
Le silence et les financements des élections présidentielles françaises par les dictateurs des anciennes colonies contribuent à vitaliser une relation décriée, malsaine et incestueuse.
Le rôle trouble des intellectuels africains
Les intellectuels africains ont le courage de s’immiscer dans les élections présidentielles françaises. Cette posture n’est pas anodine. Elle leur permet de choisir un camp. Auparavant, ces intellectuels de service avaient le choix entre la gauche et la droite française. L’extrême droite, diabolisée, n’avait pas les faveurs des prétendus rationalistes africains.
Aujourd’hui, les cartes ont été rabattues. L’extrême droite tient, certes, un discours moins violent, mais toujours discriminant. Mais elle n’a pas évolué. Elle revendique toujours sa prétendue préférence nationale, voire raciale. Dans ce contexte de dédiabolisation, pourrait-on s’étonner de voir quelques africains se rallier à Marine Le Pen ? Entre la peste et le choléra, il faut l’avouer, le choix est cornélien.
Ce qui est surprenant, c’est le choix ouvert et assumé de quelques intellectuels africains qui ont choisi ouvertement leur camp. Ils demandent de voter pour Emmanuel Macron. Ont-ils raison ou tort ?
Cette question nous interpelle tous. Pourquoi ce choix ? Ces intellectuels de service restent muets et discrets lors des élections présidentielles dans leurs pays d’origine. Qu’ils soient à l’extérieur ou sur place, ils ne se mouillent jamais. Ces silences dévoilent leur disponibilité à prendre place dans la mangeoire. Ils ne sont pas crédibles et ils jettent le doute sur leurs combats de circonstance.
Cette posture est très inquiétante sur le rôle des intellectuels africains et nous ramènent au sommet de Montpellier où la compassion et l’empathie d’Emmanuel Macron ont eu raison d’eux. Ils se prostituent et le mot est faible. Ces caméléons de circonstance cautionnent les agissements de la France en Afrique. Ils restent muets quand il faut faire un choix radical sur leurs pays d’origine. Ils déclament sous leurs identités leurs rêves inassouvis.
Nos intellectuels gagneraient à se taire et à créer des conditions pour que l’Afrique retrouve sa souveraineté, sa grandeur et sa capacité à voler de ses propres ailes. Le peuple souverain d’Afrique attend de ses enfants qu’ils arrachent leur liberté. Il ne supporte plus de voir des guignols prendre position sur les élections présidentielles françaises qui ne changeront pas leur destin.
Par Michel Lobé Étamé
Journaliste Indépendant