Le Cameroun des idées reçues
L’homme d’affaire nigérian Aliko Dangoté en 2015 a déclaré : «les pays africains francophones ne contrôlent pas leurs économies.» Le Cameroun est un pays africain considéré à 80% «francophone». Or, une certaine opinion fait croire que les Bamileke contrôlent l’économie camerounaise. Comment est-il possible d’avoir la mainmise sur une chose dont le pays n’a lui-même pas le contrôle?
Nous le savons, le Cameroun est rangé dans la catégorie PPTE (Pays Pauvre Très Endetté). Par définition, l’Etat camerounais n’est donc pas riche, économiquement parlant. Comment les Bamileke, qui ont l’emprise sur ce que notre nation ne contrôle pas, peuvent-ils être qualifiés de plus riches du Cameroun?
Il est difficile de croire que l’économie d’un pays est entre les mains de ses fils lorsqu’ils n’ont pas le contrôle d’un des plus vitaux instruments de celle-ci: la Monnaie, c’est-à-dire de leur argent ou leur porte-feuille, pour le dire simplement. Même dans l’hypothèse où les camerounais en avaient la maîtrise, notre pays est pauvre. C’est un mensonge d’affirmer que les Bamileke détiennent l’économie et sont riches. Et ceux qui nous mentent ainsi le font dans un but politique bien précis.
La richesse dans un pays moderne est produite par le secteur privé, c’est-à-dire les entreprises à capitaux privés. Le GICAM, l’organisation patronale regroupant les plus importantes sociétés au Cameroun, est constitué d’environ 350 membres. Plus de la moitié sont à capitaux français. France qui est l’unique pays étranger représenté au sein du Conseil Exécutif dudit GICAM. L’économie camerounaise n’est pas contrôlée par les camerounais, donc pas par les Bamileke, qui sont tout aussi pauvres que le PPTE que nous sommes.
Autre idée reçue : les Bamileke sont «suprémacistes» ou «ethnofascistes». Le Père Jésuite de regretté mémoire Mveng Engelbert (un Beti) a qualifié cette communauté de l’Ouest Cameroun de «peuple le plus dynamique». Dans notre contexte, de PPTE, cela signifie, de mon point de vue : «peuple le plus débrouillard». Est-il possible d’être «suprémaciste» a priori? Si, par abus de langage, nous considérons que la présidence Ahmadou Ahidjo fut celle des Fulbe ou des Nordistes, mutatis mutandis, celle du Président Biya Paul pourrait être qualifiée de «présidence Bulu ou Beti». Un Bamileke n’a jamais été à la tête de notre Etat. Il n’y a donc jamais eu de «présidence Bamileke». Après 25 ans de Fulbe, nous sommes en passe d’avoir 43 ans de Bulu/Beti. Qui est suprémaciste? Celui qui est à la tête ou aux manettes non d’un royaume mais d’une république près d’un demi siècle durant ou celui qui n’a jamais été dans une telle position, d’exercice du «pouvoir» politique?
Outre de distraire et détourner notre attention du véritable enjeu, notre souveraineté «économique» et monétaire, les fausses idées d’économie camerounaise «contrôlée» par les Bamileke et de suprématisme de ces derniers n’ont qu’un but : empêcher un fils ou une fille de cette dynamique communauté de prouver à notre peuple ce qu’il ou elle peut réaliser pour le Cameroun. Tous les camerounais doivent pouvoir diriger leur pays, pour une raison simple: il appartient à toutes ses filles et tous ses fils.
Ogolong Ondimoni Ombano (jmtv+)