La presse écrite et la radio ont été pendant des décennies, les seuls et uniques moyens de communication entre les citoyens d’un pays et le reste du monde. L’information était verticale. Elle ne permettait pas de proposer des débats multiples et contradictoires. Pour être plus précis, il y avait deux types d’informations : celles des pays capitalistes et celles de l’ancien bloc soviétique.
Qu’est-ce qui différenciaient les deux puissances ? Rien. Nous vivions dans le mensonge. L’Afrique, parent pauvre de l’information, subissait sans réagir les doctrines dogmatiques des deux camps et qui inondaient nos cercles de connaissance et de réflexion.
Aujourd’hui, à l’heure du numérique, nous sommes débordés d’informations. La télévision est venue s’ajouter aux outils de communications. Mieux encore, les réseaux sociaux se prêtent au jeu. La prolifération et la rapidité de circulation de l’information à travers la toile ont ouvert un boulevard aux débats trop longtemps confisqués par les pouvoirs publics. Des femmes et des hommes qui ne se rencontreront jamais peuvent débattre de tout et se découvrir
Dans ce contexte, le discernement devient difficile. Où est la bonne information ? Qui ment et qui dit la vérité ? Nous voilà plongés dans un labyrinthe sans issue. Le mensonge est véhiculé par les illuminés, les activistes et les pouvoirs politiques. La toile devient un support d’information qui permet de mobiliser et de galvaniser les foules. Les pouvoirs politiques ont perdu la maîtrise de l’information. Tous les sujets sont abordés. Faut-il encore croire aux médias publics traditionnels ou faut-il chercher la vérité ailleurs ? Mais où ?
L’Afrique et ses vieux démons de gouvernance
Coincée entre les deux puissances militaires et politiques du monde occidental, l’Afrique a su profiter de l’espace de liberté que lui confère les réseaux sociaux. Cette Afrique est devenue plurielle. Elle aborde tous les sujets et ne se réduit plus aux frontières coloniales qui limitaient ses accès à l’information. C’est ainsi qu’elle a découvert l’Amérique raciste, la Russie et ses goulags, l’Amérique Latine et ses luttes de libération contre la puissante voisine américaine. Mais elle a aussi découvert que d’autres modes de gouvernance existaient.
En quoi les réseaux sociaux ont-t-il changé l’Afrique ? Les réseaux sociaux ont permis aux africains, à travers leurs cultures (anglophones et francophones) de se découvrir, d’aborder des thématiques communes de liberté, de souveraineté, de gouvernance, de développement économique et social, etc.
Les francophones et les anglophones d’Afrique ont réalisé qu’ils habitaient le même continent et qu’ils avaient, à travers l’histoire, les mêmes maîtres et les mêmes religions d’assujettissement (christianisme et islamisme). La barrière linguistique n’est donc plus un problème pour communiquer. L’Afrique, après l’esclavage et la colonisation, a toujours un programme d’enseignement où deux langues s’imposent : le français et l’anglais.
A travers les réseaux sociaux, les barrières linguistiques ont sauté. L’information est diffuse et du nord au sud, de l’ouest à l’est, la jeunesse communique avec une aisance de jeune premier de la classe. Mais un élan de sursaut voit le jour et la nouvelle jeunesse s’active de plus en plus à valoriser leurs langues respectives en attendant que le Swahili devienne la langue véhiculaire d’une Afrique responsable et unie.
Les réseaux sociaux ont aussi livré à la face du monde les dictatures africaines où les modes de gouvernances échappent à la volonté du peuple. Ces régimes décriés sont consolidés par les anciens colons qui continuent à avilir tout un continent. Les dictateurs en place en profitent pour généraliser les successions dynastiques. Toutes les constitutions volent en éclats. Mais la jeunesse s’éveille et dénonce ces pratiques qui remettent en cause l’équilibre social pour un développement économique.
Les thèmes régulièrement évoqués
Nous pouvons reprocher aux réseaux sociaux leur vulgarité. Mais ils permettent à tout le continent de débattre de leurs problèmes sur des thématiques diverses et variées tels que la liberté, les droits constitutionnels, l’alternance politique, la corruption, le néocolonialisme, le développement économique et social, la mortalité infantile, la pauvreté, la monnaie coloniale, l’esclavage, le colonialisme, les retombées climatiques cataclysmiques, la dictature, les mandats présidentiels sans fin, les successions dynastiques, les pandémies, etc.
Ces thématiques canalisent les débats. Nous y découvrons que nous sommes soumis aux mêmes pressions par nos anciens colonisateurs. Les débats, à travers la toile, ont l’avantage de mutualiser nos énergies et de proposer des solutions communes. Anglophones ou francophones, nous aspirons tous à la liberté, au bien-être et à la souveraineté de nos pays respectifs. L’Afrique nous appartient.
Mais nous ne pouvons éternellement accuser nos détracteurs. Nous avons le devoir de dénoncer nos présidents asservis et incapables de privilégier nos intérêts pour nous réapproprier notre souveraineté.
Les réseaux sociaux nous permettent sans aucun doute de mieux aborder les problématiques de gouvernance. Ils réduisent aussi, avec le temps, les influences des puissances exogènes qui nous imposent encore des dirigeants assujettis.
Par Michel Lobé Étamé
Journaliste Indépendant