Démocratie ! Voilà un mot qui retentit très fort dans les oreilles de la jeunesse africaine éprise de liberté et de souveraineté. Tout ceci peut bien se comprendre car, avec la profusion des médias dans le monde, l’information circule et la jeunesse voudrait prendre sa part de responsabilité dans la construction d’un nouveau modèle social, économique et politique.
A la suite de la chute du mur de Berlin et de l’effondrement du bloc communiste dans les années 1990, les pays africains ont essayé d’initier à leur tour des campagnes de démocratisation par des conférences nationales.
Beaucoup ont cru à cette mascarade organisée par certains Etats. Mais, très vite, la jeunesse a déchanté. Les régimes autoritaires et autocratiques ont vu leurs pouvoirs vaciller. Ils ont mis fin à une expérience qui aurait pu imposer des régimes politiques transparents, copiés sur les modèles de ceux qui ont colonisé l’Afrique et des intellectuels, véritables apôtres du mimétisme ambiant.
Ces conférences ont cependant permis un progrès démocratique. Des partis d’opposition ont vu le jour. Les langues se sont déliées et ont permis d’écouter des voix certes disparates, mais qui proposaient de nouvelles alternatives aux pouvoirs en place.
Le Bénin et le Sénégal ont été des modèles à rappeler. Des élections ont permis l’arrivée au pouvoir des oppositions avec un discours différent et très à l’opposé de la pensée unique et monocorde. Au Bénin, le peuple a élu un homme du terroir qui a battu le candidat de la France parachuté.
L’arrivée de Talon au pouvoir a fait resurgir les espoirs. Ce dernier a su haranguer les foules. L’homme du terrain s’est fait plébisciter, suscitant un profond intérêt sur la jeunesse. Qui ne se souvient de sa boutade lors de son premier mandat : « Je ferai de mon mandat unique une exigence morale en exerçant le pouvoir d’Etat avec dignité et simplicité ».
En prêtant serment en avril 2016, Patrice Talon s’engageait à ne faire qu’un mandat de cinq ans à la tête du Bénin. Le 15 janvier 2021, Patrice Talon annonçait qu’il se portait candidat à un second mandat comme il y est d’ailleurs tout à fait autorisé.
Le président béninois a pris soin de bastillonner tous ses opposants politiques. Beaucoup se sont exilés pour échapper à la chasse à l’homme. Il s’est conformé comme ses prédécesseurs. Le pouvoir, ce pouvoir qui obstrue et qui masque les manquements aux engagements. Mais, pire encore, Patrice Talon est tenté par un troisième mandat. L’appétit vient-il en mangeant ?
Macky Sall, président en exercice au Sénégal, est aussi tenté par un troisième mandat. Pour y parvenir, il élimine ses opposants et ne manque pas de recourir à des moyens peu orthodoxes. Son opposant juré n’est autre qu’un jeune politicien qui est convaincu qu’une autre politique est possible. Ironie du sort, il est accusé de tentative de viol. Face à une justice partiale et aux ordres, le pauvre Ousmane Sonko finira-t-il en prison pour laisser le champ libre au purificateur Macky Sall ?
Pour contourner les constitutions, l’obsession du troisième mandat est devenue une voie royale pour tous les présidents africains qui s’accrochent au pouvoir. Alassane Ouattara en a abusé, toute honte bue, pour se maintenir. Serait-ce le cas de Faustin Archange Touadéra qui suscite tant d’espoir auprès des africanistes en République Centrafricaine ?
Les prochaines échéances présidentielles en Afrique vont ternir, une fois de plus, l’image d’une Afrique livrée à des prédateurs et à des successions monarchiques. Les exemples du Togo, du Gabon, du Tchad vont se normaliser pour rejoindre le cercle fermé de présidents à vie tels que Paul Biya, Denis Sassou Ngesso, Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, etc.
A ce rythme, les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) ne seront jamais atteints. Les pouvoirs reptiliens en place ne sont pas disposés à partir la tête haute comme le fit Nelson Mandela.
Par Michel Lobé Étamé
Journaliste Indépendant