COLLOQUE
SUR L’IMPACT GLOBAL DE LA GUERRE EN UKRAINE
L’Afrique et Enjeux du Conflit Ukrainien
Le 28 Février de 14h00 à 18h00
Académie Géopolitique de Paris
Au 5 Rue Conté 75003 Paris
Monsieur le Président de l’Académie Géopolitique de Paris,
Messieurs les Officiers Généraux et Amiraux
Excellence, Messieurs les Ambassadeurs
Chers Académiciens
Messieurs, Mesdames les Recteurs et Directeurs des Instituts
Chers Invités, Mesdames et Messieurs
Je suis Jean Blaise GWET, Homme politique, Commandeur de la légion d’honneur, deux fois candidat aux Élections Présidentielles de 2011 et 2018. A nouveau, je suis candidat à la prochaine élection présidentielle de 2025. Avec force forte conviction cette fois, d’être élu le prochain Président de la République du Cameroun.
Mesdames et Messieurs, avant de rentrer dans le vif du sujet qui nous réunit ici ce jour, permettez-moi, d’exprimer ma profonde gratitude au Président de l’Académie Géopolitique de Paris , qui m’a fait l’insigne honneur de me convier à intervenir à ce colloque sur l’impact global de la guerre en Ukraine et particulièrement sur la Thématique: L’Afrique et Enjeu du Conflit Ukrainien.
I – Introduction :
L’évolution du monde a toujours été jalonnée par des conflits, qui de par leur importance ont eu un impact modifiant la situation politique, économique ou sociale dans certaines régions du monde. Le conflit ukrainien, bien que mettant aux prises deux nations européennes, crée des secousses aux quatre coins du monde, et l’Afrique est durement affectée. En effet, à peine remise du choc lié au covid-19, l’Afrique expérimente un choc nouveau mondial et les voyants sont loin d’être au vert, ils sont même plutôt au rouge vif. Dans un contexte international marqué par des incertitudes et des changements imprévisibles, la grande dépendance de l’Afrique aux importations dans pratiquement tous les domaines, traduit ses défaillances structurelles ainsi que sa vulnérabilité, tant elle peut être de manière très dramatique fragilisée par des conjonctures internationales. Bien qu’éloigné géographiquement du conflit russo-ukrainien, le continent Africain paie un lourd tribut qui se caractérise sur le plan économique par une hausse des prix des denrées alimentaires et du carburant, une inflation galopante, l’insécurité alimentaire, un surendettement des États.
Sur le plan politique, le conflit en Ukraine a également des implications non négligeables puisqu’on observe des divergences d’opinion tant sur la condamnation de l’invasion russe, que sur les sanctions adéquates à appliquer. L’évènement, loin d’être anecdotique, témoigne d’une influence Russe grandissante sur le continent Africain.
Dans ce conflit, au moins 22 pays africains n’ont pas exprimé leur opinion du vote lors de l’Assemblée générale de l’ONU visant à condamner l’invasion Russe de l’Ukraine. Seize pays du continent se sont abstenus, les autres étaient absents. Le conflit en Ukraine est révélateur des divisions du continent.
Selon Michel Galy, politologue spécialiste de l’Afrique de l’Ouest interrogé par TV5 MONDE, “le vote révèle un malaise et la division d’une Afrique qui ne sait pas s’il est préférable de suivre le pays référence ou prudemment s’abstenir tant qu’on n’a pas encore le dernier mot du conflit.”
Un problème direct posé aux pays africains par la guerre en Ukraine a été le rapatriement de leurs ressortissants vivant en Ukraine, principalement des étudiants. Après les premiers bombardements, de nombreux d’entre eux sont restés bloqués en Ukraine, sans l’aide de leur pays.
II – Guerre en Ukraine : Comment le conflit est-il perçu en Afrique ?
Le conflit en Ukraine est révélateur de division en Afrique, à Bangui par exemple, dans la capitale de la République Centrafrique, des centaines de personnes se sont réunies pour manifester leur soutien à l’invasion Russe de l’Ukraine. Les manifestants se sont réunis au pied d’une statue représentant des combattants Russes qui protègent une femme et ses enfants. Inaugurée en 2021 par le Président Faustin Archange TOUADERA, l’installation de cette statue a pour but de remercier les soldats Russes lui étant venus en aide pour reprendre le contrôle du pays ces dernières années. L’évènement, loin d’être anecdotique, témoigne tout de même, d’une influence Russe grandissante sur le continent. À l’heure où la grande majorité de la communauté internationale condamne l’invasion de l’Ukraine, la position des pays africain apparaît plus ambigüe.
Un autre fait remarquable de division du continent pour de nombreux observateurs, l’abstention du Sénégal. Le Président Sénégalais Macky Sall tient un double-discours. D’une part, en tant que Chef d’État, il tente de ménager une opinion publique nationale au sein de laquelle se répand un discours anti français et antioccidental. D’autre part, en tant que Président de l’Union Africaine (UA), il adopte un discours moins nuancé en faveur de l’Ukraine. Dans un communiqué de presse, l’UA appelle d’ailleurs au “respect impératif de la souveraineté nationale de l’Ukraine”.
L’Afrique du Sud, qui s’est abstenue, a rappelé son inquiétude pour les civils ukrainiens. Selon les Sud-Africains, la résolution ne crée pas d’environnement favorable aux négociations et ne permet pas de rapprochement entre l’Ukraine et la Russie. Selon Francis Kpatinde, interrogé par TV5Monde, le pays aimerait se positionner en tant que médiateur entre l’Ukraine et la Russie. Madagascar, qui s’est aussi abstenue, a fait de même. Toutefois, la majorité des pays du continent (28) s’est prononcée en faveur d’une condamnation Russe. L’Afrique du Sud approuvait originellement le texte avant de s’abstenir. Au Maroc, l’une des raisons invoquées pour expliquer l’abstention au vote de la résolution est l’abstention répétée des Russes concernant les résolutions sur le Sahara occidental au Conseil de sécurité de l’ONU. Le ministère des Affaires étrangères marocain précise aussi dans un communiqué que le pays reste fidèle au principe de la “neutralité positive”.
III – Le Conflit Ukrainien : Une Chance Pour l’Afrique de Réduire la Dépendance et de s’imposer sur la scène internationale
Au-delà de toutes les difficultés que traversent les pays africains, le conflit Russo-ukrainien peut également être perçu comme l’occasion pour l’Afrique de se renouveler, tant politiquement, que économiquement et socialement. Face aux différents chocs mondiaux, une réponse africaine est nécessaire pour stabiliser les marchés des produits de base, faire face au coût croissant de la dette, tout en augmentant la capacité des personnes à être en sécurité sur le plan alimentaire. Afin d’endiguer la dépendance aux importations et aux exportations, un financement à long terme sur des infrastructures dans le secteur agricole et un renforcement des capacités industrielles s’imposent. Le continent africain fonctionne en dessous de ses capacités agricoles. Les pays africains doivent donc profiter de leur part de 60% de terres arables dans le monde pour produire davantage de nourriture. Cela permettra de faire baisser le nombre de personnes touchées par la famine, et d’être mieux préparé pour affronter les prochains chocs externes.
Le développement des systèmes inclusifs en Afrique se présente également comme une nécessité, pour promouvoir un commerce intra-africain. Dans ce sens, la création en cours de la zone de libre-échange continentale africaine marque une évolution notable, en ce sens qu’elle va faciliter le commerce et favoriser la circulation des denrées et produits « Made in Africa ». Une véritable complémentarité pourra alors s’installer, afin de permettre aux zones en excédent alimentaire de desservir celles qui présentent un déficit.
Des investissements pour soutenir les micros projets, des petites et moyennes entreprises dans les secteurs de la pêche de l’environnement et du tourisme seront également d’un grand apport. Les changements climatiques devront en plus être observés attentivement puisque, selon les nations unies, 38 millions de personnes supplémentaires sont menacées par la faim et la pauvreté en Afrique à cause des changements climatiques.
Le conflit ukrainien doit également être l’occasion pour les pays africains d’affirmer leur autonomie politique, en assumant leurs différentes positions, loin de l’alignement systématique derrière les prises de position occidentales.
Le conflit ukrainien met en exergue de nombreux enjeux pour les pays africains. Durement touchés sur le plan économique compte tenu de
leur dépendance aux importations et aux exportations, de la faiblesse de la production agricole et des infrastructures industrielles, ils peuvent néanmoins profiter de cette crise pour donner un nouveau souffle à leurs modèles économiques, développer des systèmes commerciaux inclusifs, et se démarquer politiquement en prenant des positions singulières et totalement assumées sur la scène internationale.
IV – Conclusion :
Le conflit en Ukraine bouleverse l’ordre mondial, impact directement l’Afrique, avec des conséquences directes à court et moyen terme sur son économie, sa politique, son peuple. C’est peut-être une occasion pour l’Afrique de prendre son envol.
Je vous remercie
Jean Blaise GWET