NGONGO (Louis-Paul), *Histoire des Institutions et des faits sociaux du Cameroun. Tome I : 1884 – 1945*, Paris, Berger-Levrault, 1987, pages 55-56 :« La protection des terres appartenant aux autochtones est réglementée : une loi de 1910 défend de les vendre aux colons. Seule reste autorisée l’expropriation pour utilité publique. »
Pour mémoire, en 1910, le Kamerun est *juridiquement* un protectorat allemand, mais dans les faits, c’est-à-dire *sociologiquement*, le Kamerun est une colonie allemande. Ici, nous n’allons faire que deux (02) commentaires, par rapport à l’extrait cité ci-dessus…
_*1°)*_ Lorsque les Allemands étaient les maîtres du Kamerun, un cas célèbre d’expropriation pour utilité publique peut être rappelé. Il s’agit du plateau Joss dans la ville de Douala, qui a été choisi par l’administration coloniale allemande, comme site administratif. On se rappelle qu’un certain Douala Manga Bell s’est opposé à ladite expropriation pour utilité publique, au motif qu’elle violait des dispositions du Traité Germano-Douala de 1884, mais rien n’y fit : au contraire même, Douala Manga Bell fut exécuté par les Allemands !
_*2°)*_ En dehors du cas d’une expropriation pour utilité publique, il semble assez curieux, voire même paradoxal, d’observer que les Allemands, maîtres incontestés du Kamerun en 1910, se soient interdits à eux-mêmes d’[ACHETER] les terres des populations autochtones. En effet, il faut bien chercher à comprendre, pourquoi en 1910, les Allemands ont promulgué une loi qui interdisait que les terres des autochtones puissent être [VENDUES] aux colons, c’est-à-dire à eux-mêmes ?
Ces deux (02) commentaires étant faits, on pourrait se demander quel est l’intérêt pour le *politologue aguerri* qu’est l’épistémologue, DE RAPPELER EN 2023, que l’administration publique de l’époque coloniale, *il y a déjà 113 années*, avait interdit que des gens richissimes _— en l’occurrence ici les colons, c’est-à-dire les [Occidentaux] dont la puissance financière comparée à celle des [Indigènes] était de loin supérieure —_ puissent s’accaparer des terres des populations indigènes ou autochtones…
Il faudrait de longs développements pour répondre à cette interrogation, *mais un problème bien posé étant à moitié résolu*, je ne doute pas qu’au milieu de la tempête soulevée par le sociologue Claude Abe (Pr) _— c’est-à-dire au milieu d’un déni de rationnalité, au milieu d’une résurgence larvée de crispations identitaires ou ethnico-tribales —_, ce nécessaire retour *DANS L’HISTOIRE MÉCONNUE DE NOTRE PAYS* contribuera à sortir les uns et les autres, de leurs raisonnements dogmatiques et passionnels…
Faustin ETOUKE, épistémologue