L’organisation de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) a mis en lumière les nombreux scandales financiers qui éclaboussent le Cameroun. Le pays aurait dû suivre les voies de la raison et de l’honneur quand l’ONG Transparency International, en 1999, le classait premier au hitparade des pays les plus corrompus au monde. Cette position n’a pas alerté les pouvoirs publics à combattre les vieilles habitudes qui se sont solidement installées.
Faut-il pour autant dire que la corruption est un mal endémique qui ne peut être combattu ? Quelques galériens ont été envoyés en prison. Ces actes ont été salués comme des messages forts d’un chef d’Etat absent. Mais il n’en est rien. La gabegie suit son cours. Le vol poursuit inlassablement son parcours. Le déficit public est au rouge avec un accroissement exponentiel d’une dette publique abyssale.
Le pays croule sous des projets entamés et jamais livrés. Les scandales s’amoncellent, tels des détritus sur la voie publique. L’homme de la rue, médusé et incrédule est convaincu que la bulle va exploser. Que nenni ! La gouvernance en place est aveugle. Elle est aussi sourde et muette. On finit par se demander si le capitaine devant le gouvernail est handicapé de quelques membres et surtout du cerveau.
L’échec de la CAN a encouragé les fossoyeurs des deniers publics. Aucun d’eux n’a été égratigné. Pire, Paul Biya s’est personnellement engagé sur la CAN. Nous savons tous aujourd’hui que cet engagement s’apparente aux nombreux chantiers initiés et jamais achevés. Le chef de l’Etat ne rend jamais de comptes. Pourquoi en serait-il autrement pour ses collaborateurs véreux ? Tant pis pour la population. Elle s’est habituée aux scandales de tous genres. Elle est blasée.
Livrée à un tintamarre inaudible, l’information du caniveau rejoint celle des élites. Le fruit est enfin mûr. Il va tomber. Mais de quoi parlons-nous ? Le Cameroun des élites, des intellectuels, des majestés et des honorables s’accroche aux nominations qui se font attendre. Tels des chiens de Pavlov, ils attendent la becquée. Ils se trompent. L’homme Lion n’a jamais sévit. Il est vrai que quelques brebis galeuses ont été éconduites de la mangeoire. Mais ils représentaient un danger politique.
Le scandale du covidgate
Le rapport de la Cour des Comptes du Cameroun est explosif sur la gestion des fonds Covid du FMI. On y découvre des incongruités tels que la production locale des comprimés de chloroquine, des dépassements de budget, des évasions des fonds douteux entre prestataires, etc… Un scandale de trop sur une longue liste en cette période d’incertitude ?
Nous n’en sommes plus à un scandale près. Les détournements des deniers publics, la corruption, la passivité de la justice, les marchés publics de gré à gré et les surfacturations constituent l’exercice favori des hommes du pouvoir.
Rien ne bouge. Certes, l’émotion est là. Mais ici, les scandales financiers ont un parfum de rose. Ceux qui s’en empreignent attirent les mouches vagabondes comme les carcasses attirent les charognards.
Les fonds du FMI devaient financer l’achat des médicaments, des masques, des kits de dépistage du covid-19 et l’achat des ambulances. Cet argent s’est volatilisé. Par qui ? La liste des pourfendeurs est longue. A y voir de près, dans une démocratie participative, tout le gouvernement aurait sauté. Mais nous sommes au Cameroun. Le pays, de tous les abus…
Le Cameroun, insensible à la honte va se retourner, une fois de plus vers le FMI pour solliciter une rallonge de prêt. Les détournements des fonds dédiés au Covid-19, sous l’égide du FMI, ne sont qu’un scandale de plus. Ils viennent s’ajouter à une longue liste de détournements de milliers de milliards de francs CFA que nous avons du mal à égrener : les projets d’infrastructures inachevées, l’autoroute Douala-Yaoundé, le pont du Wouri, le barrage hydroélectrique de Lebanga, le barrage de Mékin, la CAN 17, etc.
Le Cameroun devrait cette fois-ci se soumettre aux exigences du FMI qui réclame un audit indépendant sur la gestion des fonds Covid. En attendant toutes les lumières, Yaoundé a la tête sous l’eau. Mais c’est une bien veille habitude qui n’ébranle plus les pourvoyeurs des fonds publics habitués à l’impunité.
Par Michel Lobé Étamé
Journaliste Indépendant