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Le thème de la Journée mondiale des enseignants 2024 est « Valoriser les voix des enseignants : vers un nouveau contrat social pour l’éducation ». Il met en lumière l’importance d’incorporer les perspectives des enseignants dans les politiques éducatives et les processus décisionnels. Il souligne également l’urgence d’améliorer leurs conditions de travail et de reconnaître leur rôle crucial dans la transformation de l’éducation et de la société.
Un thème fort à propos pour le Cameroun où depuis plusieurs années, nombre d’enseignants du secteur public vivent une situation de précarité et de frustration croissante. Ces professionnels, essentiels pour l’avenir du pays, sont confrontés à de nombreux défis qui affectent non seulement leur bien-être, mais aussi la qualité de l’éducation qu’ils dispensent.
Nous sommes bien loin de l’Âge d’Or de l’enseignant où il était considéré comme un pilier de la société. Son rôle dans la formation des jeunes générations lui conférait un statut élevé et un respect profond de la part de la communauté. Il était souvent vu comme une figure d’autorité morale et intellectuelle, et son avis était sollicité sur des questions importantes, même au-delà du domaine éducatif.
Les conditions de travail de l’enseignant étaient généralement meilleures. Il recevait des salaires réguliers et adéquats, ce qui lui permettait de vivre confortablement et de se concentrer pleinement sur sa mission éducative. Les infrastructures scolaires étaient mieux entretenues, et les classes étaient moins surchargées, permettant un enseignement plus personnalisé et efficace.

Les relations entre l’enseignant, les parents et les élèves étaient marquées par une grande collaboration et un respect mutuel. Les parents soutenaient activement l’enseignant et valorisaient son travail, reconnaissant l’importance de l’éducation pour l’avenir de leurs enfants. Les élèves, quant à eux, voyaient leur enseignant comme un modèle à suivre et respectaient son autorité.
Que dire aujourd’hui ?

  1. CONDITIONS DE TRAVAIL ET SALAIRES

Les établissements publiques au Cameroun souffrent d’un manque criant de ressources. Les salles de classe sont trop souvent surpeuplées, avec des effectifs dépassant parfois les 100 élèves par classe. Les infrastructures sont souvent vétustes, manquant de matériel pédagogique de base comme les livres, les fournitures scolaires. Beaucoup ne reçoivent pas de salaire régulier, certains étant même sans rémunération depuis plusieurs années.
Mouvements de Grève
Face à cette situation intenable, les enseignants avaient lancé plusieurs mouvements de grève, dont les plus notables sont “On a trop supporté” (OTS) et “On a trop attendu” (OTA). Ces mouvements visaient à attirer l’attention sur leurs conditions de vie et de travail, et à exiger des réformes concrètes de la part du gouvernement.
Revendications et Réponses du Gouvernement
Les revendications des enseignants étaient claires : paiement des arriérés de salaires, adoption d’un statut particulier pour les enseignants, et organisation d’un forum national de l’éducation.
Souffrances des Enseignants du Point de Vue Humain
Les enseignants du secteur public au Cameroun ne sont pas seulement des professionnels en difficulté, mais aussi des êtres humains confrontés à des défis quotidiens qui affectent profondément leur vie personnelle et familiale.
Impact Psychologique et Émotionnel
L’incertitude financière et les conditions de travail précaires ont un impact considérable sur la santé mentale des enseignants. Le stress constant lié à l’absence de salaire régulier et à la peur de l’avenir crée un climat de désespoir et de frustration. Ce qui affecte leur capacité à enseigner efficacement et à interagir positivement avec leurs élèves.
Vie Familiale et Sociale
Les difficultés financières des enseignants se répercutent également sur leur vie familiale. Incapables de subvenir aux besoins de base de leur famille, ils se sentent souvent impuissants et honteux. Cette situation peut entraîner des tensions au sein du foyer, affectant les relations avec leurs conjoints et leurs enfants. De plus, le manque de ressources limite leur participation à des activités sociales et communautaires, les isolant davantage.
Le Manque de Respect envers les Enseignants
Les enseignants du secteur public au Cameroun estiment faire face à un manque de respect de la part de l’administration, des parents et des élèves, ce qui aggrave leurs conditions de travail déjà difficiles.
De la Part de l’Administration
Les enseignants se sentent souvent négligés et non reconnus par les autorités éducatives. Les retards de paiement des salaires, le manque de soutien administratif et l’absence de reconnaissance officielle de leurs efforts contribuent à un sentiment de frustration et de démotivation. Les conflits récurrents entre les chefs d’établissements et les enseignants, souvent dus à des incompréhensions et à des pratiques administratives peu orthodoxes, exacerbent cette situation.
De la Part des Parents
Les parents, confrontés à leurs propres défis économiques et sociaux, peuvent parfois manquer de respect envers les enseignants. Certains parents considèrent les enseignants comme responsables des échecs scolaires de leurs enfants, sans tenir compte des conditions difficiles dans lesquelles ces derniers travaillent. Cette attitude peut créer des tensions et un manque de collaboration entre les parents et les enseignants, nuisant à l’environnement éducatif global.
De la Part des Élèves
Les élèves, influencés par l’attitude de leurs parents et par le manque de respect général envers la profession enseignante, peuvent également manquer de respect envers leurs enseignants. Les comportements indisciplinés et le manque de considération pour l’autorité des enseignants sont des problèmes courants dans les écoles. Cette situation rend l’enseignement encore plus difficile et stressant pour les enseignants.

  1. LE SACERDOCE DES ENSEIGNANTS DANS LES ZONES RECULÉES

Les enseignants des zones reculées du Cameroun font face à des défis supplémentaires qui rendent leur travail encore plus ardu.
Manque de Moyens de Locomotion
Dans de nombreuses régions rurales, les enseignants doivent parcourir de longues distances à pied ou à moto, pour se rendre dans leur lieu d’affectation, faute de moyens de transport adéquats. Cette situation est particulièrement difficile pendant la saison des pluies, lorsque les routes deviennent impraticables. L’accessibilité limitée des écoles décourage la fréquentation scolaire et contribue à un taux élevé d’abandon scolaire.
Inexistence d’Hôpitaux ou de Centres de Santé
L’absence d’infrastructures de santé dans les zones reculées pose un problème majeur. Les enseignants et leurs familles n’ont souvent pas accès à des soins médicaux de base, ce qui met leur santé en danger.
Manque de Logement
Les enseignants des zones rurales vivent souvent dans des logements précaires, et insalubres. Cette situation affecte leur qualité de vie et leur capacité à se concentrer sur leur travail.
Surpopulation et Manque de Ressources
Les salles de classe dans les zones rurales sont souvent surpeuplées, avec des effectifs pouvant atteindre 70 à 80 élèves par classe. Cette surpopulation rend l’enseignement et l’apprentissage extrêmement difficiles, car les enseignants ne peuvent pas accorder une attention individuelle à chaque élève.
Infrastructures Inadéquates
Les infrastructures scolaires
dans l’arrière-pays sont souvent vétustes et mal équipées. Les écoles manquent de matériel pédagogique de base, comme les livres, les tableaux et les fournitures scolaires, l’informatique est un luxe et un rêve inaccessibles, certains élèves doivent s’asseoir par terre faute de pupitres suffisants. Les enseignants, quant à eux, doivent souvent improviser avec les moyens du bord pour dispenser leurs cours. De plus, les bâtiments scolaires sont souvent en mauvais état, avec des toits qui fuient et des salles de classe mal ventilées.
Malnutrition des Enfants Scolarisés
La malnutrition est un problème majeur qui affecte de nombreux enfants scolarisés au Cameroun, particulièrement dans les zones rurales. Cette situation a des conséquences graves sur leur santé, leur développement et leurs performances scolaires. Ils ont des difficultés à se concentrer et à apprendre, ce qui se traduit par de faibles performances scolaires. La malnutrition précoce est directement liée à des taux élevés d’abandon scolaire et à une faible réussite académique.

CONCLUSION
En cette Journée Internationale de l’Enseignant, il est crucial de reconnaître et de célébrer le rôle indispensable que jouent les enseignants dans la société. Malgré les défis et les difficultés auxquels ils sont confrontés, notamment au Cameroun, leur dévouement et leur résilience restent inébranlables. En investissant dans des conditions de travail décentes, en assurant une rémunération juste et en renforçant le respect et la collaboration entre tous les acteurs de l’éducation, l’Etat peut créer un environnement où les enseignants peuvent s’épanouir et exceller.

À tous les enseignants, nous disons merci. Merci pour votre passion, votre patience et votre persévérance. Vous êtes les véritables héros de notre société, et votre impact est inestimable, en cette journée spéciale !
“ *L’enseignement est la seule profession qui crée toutes les autres professions .” – Anonyme
par Isabelle ESSONO

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