A qui profite la tournée d’Emmanuel Macron en Afrique ?
Le voyage d’Emmanuel Macron en Afrique est une bouée de sauvetage pour les présidents d’Afrique francophone en exercice confrontés au cours des deux prochaines années à des échéances électorales. Pour les analystes politiques, c’est un fiasco.
Le président français le sait et ne déroge pas à la sacro-sainte règle postcoloniale qui consiste à assoir la domination de la France dans ses anciennes colonies. Ce voyage est un non évènement car la France n’est pas disposée à changer ses politiques à l’égard des partenaires formattés à rendre des comptes à leur mentor et non à transformer les ressources des sols et des sous-sols de leurs pays respectifs.
La jeunesse africaine éveillée attendait une véritable rupture avec un partenaire arrogant dont le discours condescendant n’est plus supportable. Macron est resté sourd et intransigeants dans un contexte international où l’amour de la France bat de l’aile.
Changer de logiciel, une urgence vitale
La tournée d’Emmanuel Macron en Afrique était attendue par tous ceux qui espèrent toujours une nouvelle politique de coopération de la France avec ses anciennes colonies. Dans ce contexte, il fallait aborder les sujets qui alimentent les débats :
- Le franc CFA ;
- Les bases militaires ;
- La Françafrique, etc.
A tort ou à raison, ces sujets brûlants n’ont pas été évoqués. Ils n’ont fait l’objet d’aucun débat ni en Afrique, ni en France. Le temps presse pourtant pour dérouler un nouveau logiciel conçu sous de nouvelles bases de coopération plus équitable, juste et qui tiennent compte des aspirations de chaque partenaire. Est-ce vraiment le cas ? Nous pouvons en douter.
Mais ne soyons pas dupe. Emmanuel Macron a proposé à ses partenaires africains une nouvelle gestion de ses bases militaires.
Cette nouvelle rhétorique reste confuse car cette annonce a surpris tout le gotha une fois encore embarqué dans un flou constant et coutumier. C’est ce que l’on appelle l’art de l’esquive. Emmanuel macron a proposé à ses anciennes colonies une nouvelle refondation militaire sur ses quatre bases militaires permanentes en Afrique : Côte d’Ivoire, Gabon, Djibouti et Sénégal. La proposition de la France n’est donc pas de nature à calmer les esprits partisans d’une disruption totale avec les accords de coopération d’un autre âge.
La société civile africaine attendait un discours plus fluide. Il n’en a rien été. Emmanuel Macron, digne héritier de Mitterrand, de Chirac, de Sarkozy et de Hollande, est venu avec des propositions qui n’ont fait l’objet d’aucun débat préalable avec les pays concernés. Il offre à ses partenaires un package qu’il faut dérouler pour le bon plaisir. Aurait-il eu la même attitude avec ses partenaires européens ?
La pauvreté systémique en Afrique mérite d’autres formes de coopération. Le continent est confronté à de nombreuses manifestations économiques, sociales et même écologiques, sans oublier les défis permanents de la pandémie du Covid, l’insécurité, le sida, Ebola ou le paludisme.
L’Afrique ne peut se contenter d’un discours creux qui balaie d’un revers de la main ses urgences quotidiennes de survie.
Les présidents africains ne peuvent plus reculer face à ces urgences qui vont ébranler leur pouvoir politique et ouvrir la voie à une profonde période d’instabilité. Car le peuple a faim. Il veut jouir de ses richesses endogènes dont il ne voit jamais la couleur.
Par Michel Lobé Étamé
Journaliste Indépendant